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Épidémie de choléra au Yémen : un danger mortel pour les femmes enceintes
- 21 Juillet 2017
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SANA’A, Yémen – L'épidémie de choléra au Yémen se propage à un rythme sans précédent avec une moyenne de 5000 personnes infectées chaque jour, et près d'un mort par heure selon un rapport des Nations Unies. En moins de trois mois, plus de 330 000 cas suspects de choléra ont été rapportés, avec près de 1 800 décès.
Les femmes enceintes et celles qui allaitent, en particulier celles qui souffrent de malnutrition, sont particulièrement vulnérables. On estime que 1,1 million de femmes enceintes malnutries sont menacées et nécessitent des soins immédiats.
Ibtisam a contracté le choléra lors de son neuvième mois de grossesse. « Je suis allée dans un établissement de santé dans ma ville natale dans le gouvernorat de Rayma, mais ils n’ont pas pu faire de diagnostique », a-t-elle déclaré à l’UNFPA. « J'ai cru que j'allais mourir et perdre mon bébé. Mon premier enfant allait naître, et j'étais désespérée à l’idée de le perdre. »
Son mari l'a conduite à l'hôpital du 22 mai à Sanaa, situé à cinq heures de route de leur domicile. Là, on lui a diagnostiqué le choléra et elle a été traitée.
« Ibitsam était dans son dernier mois de grossesse. Si elle était arrivée un ou deux jours plus tard, il n’est pas sûr que nous aurions pu la sauver, elle ou son bébé », a déclaré le docteur Farea, qui a aidé à la traiter.
La crise du choléra - actuellement la pire au monde - vient tel un coup fatal, s’ajouter aux épreuves auxquelles sont confrontés les hommes et les femmes yéménites.
L' ampleur de l'épidémie est directement liée au conflit brutal en cours au Yémen et à la crise des déplacements, à l’effondrement des systèmes de santé et d'assainissement, et à une grave insécurité alimentaire. On estime que 14,8 millions de personnes n'ont pas accès aux services de santé et 15,7 millions n'ont pas accès à l'eau potable et à des sanitaires adéquats.
Les femmes enceintes et les femmes qui allaitent sont particulièrement vulnérables à la malnutrition, celles qui sont affaiblies par la crise nutritionnelle sont plus sujettes aux infections, y compris le choléra. Les femmes enceintes qui contractent le choléra ont un risque plus élevé de développer des complications dangereuses, voire mortelles.
Les femmes, à cause de leurs responsabilités et tâches domestiques, peuvent également faire face à une exposition accrue au choléra. Pourtant, leur pouvoir limité en termes de prise de décision et de contrôle des ressources du ménage signifie qu’il leur serait plus difficile d'acceder à des soins médicaux lorsqu'elles tombent malades.
« Le nombre de cas de choléra que nous recevons en une journée nous dépasse ; Nous pouvons à peine y répondre », a déclaré le Dr Farea à l’UNFPA. « La semaine dernière, nous avons reçu une autre femme qui était dans son dernier mois de grossesse et qui souffrait de déshydratation extrême. Elle a accouché aussitôt, mais le bébé n'a survécu que deux jours. Il est très important que les femmes enceintes viennent à hôpital dès qu'elles développent les symptômes du choléra, afin de ne pas risquer leur vie ou celle de l’enfant qu’elles portent. »
Les femmes peuvent toutefois constituer un maillon essentiel dans la lutte contre la propagation du choléra car traditionnellement, il leur incombe la tâche de préparer les aliments. Le choléra se propage souvent au travers de l'eau ou des aliments contaminés.
« La plupart des cas que nous recevons sont des femmes et des enfants. Il est important que les campagnes de sensibilisation prennent également en compte le rôle que peuvent jouer les femmes et que celles-ci soient ciblées plus particulièrement », a déclaré le Dr Farea. « Si les femmes connaissaient les mesures à prendre afin de prévenir le choléra et détecter ses symptômes dès les premiers signes, nous pourrions sauver beaucoup de vies ».
Aman'a, 35 ans, mère de cinq enfants, est consciente de la nécessité d'une bonne hygiène, mais les conditions de vie ardue ont rendu la prévention des maladies très difficile.
« À la maison, je prends toutes mes précautions lorsque je prépare à manger et je m'assure que mes enfants fassent pareil. Malgré cela, j'ai été infectée après une visite chez l’un de mes proches », a-t-elle déclaré.
« J'essaie de faire part à mes amis et à ma famille de la nécessité à la fois de maintenir une bonne hygiène et de laver les fruits et légumes avec de l'eau propre plusieurs fois avant de les consommer », a-t-elle ajouté.
L’UNFPA a intensifié ses efforts de lutte contre l'épidémie, en mettant l'accent sur les besoins des femmes et des filles.
Les trousses d’hygiène – qui contiennent habituellement des articles tels que du savon, des serviettes hygiéniques et des articles vestimentaires de base – ont été complétées avec des dépliants sur la prévention du choléra et distribuées dans les zones avec un nombre élevé de cas suspects de choléra. Avec le soutien du gouvernement japonais, environ 40 000 trousses ont été distribuées depuis le début de l'épidémie en avril.
« J'étais terrifiée quand j'ai entendu parler de l'épidémie de choléra et la façon brutale dont cette maladie tue les gens », a déclaré Om Ibrahim, bénéficiaire de l’une des trousses d’hygiène. Selon elle, elle n'aurait pas eu les moyens de s’acheter du savon ou aucun des autres articles. « Je veux nous protéger mes enfants et moi. »
Les sages-femmes soutenues par l’UNFPA, les cliniques mobiles et les séances de sensibilisation communautaire fournissent également des informations sur les moyens de contrôler la propagation du choléra. Et les cliniques mobiles de santé reproductive fournissent conseils nutritionnels, dépistages et consultations des mères et des bébés souffrant de malnutrition dans les régions éloignées et difficiles d’accès.
De plus, 415 kits de santé reproductive – assez pour près de 110 000 femmes – ont été distribués au cours des trois derniers mois aux établissements de santé dotés de centres de traitement contre le choléra dont les ressources sont limitées.
Traduit de l'anglais par Mikael Bisseck